Il allait le tuer.
Ca n’était pas plus compliqué que ça.
A dire vrai, ça l’était même moins que ça : ce foutu gaijin se foutait tout simplement de sa gueule et Shinji ne supportait pas ça.
Assis à son bureau, encore absourdi par l’attitude des plus irrespectueuses d’Himura, Shinji dut prendre quelques minutes pour s’en remettre. Ce mec avait du sang américain dans les veines, ce n’était pas possible autrement, le Shukon en était persuadé. Même un européen –pour ce qu’il en savait – n’aurait pas osé se comporter comme ça.
- Nakajima ! On a problème avec des gars au bar ! Y en a un qui a essayé de toucher Sat-chan.
Classique… La petite Keiko était mignonne. Ce qui était un atout en soi. Combien de gars se déplaçaient jusqu’au bar pour se faire servir par la jeune fille et essayer – bien maladroitement – d’échanger quelques mots (peut-être même lui glisser leur numéro de téléphone, qu’est-ce qu’il en savait ?) … mais avec la soirée qui avançait et l’alcool qui rendait plus entreprenant, voire même carrément lourd, il n’était pas rare qu’une bagarre n’éclate à cause d’une main trop baladeuse.
- J’arrive, j’arrive.
Se levant, il rejoignit le serveur qui l’avait hélé et passant devant lui, il retraversa les couloirs aux murs bétonnés de son pas rapide et sec. La porte qui le séparait du rez-de-chaussée ne tarda d’ailleurs pas à claquer sur son passage.
Comme toujours, la foule se pressait dans les escaliers, dans les couloirs, dansant là où elle le pouvait sur les rythmes imposés par le DJ de ce soir. De la main, il fit signe à l’un des hommes de son père de le suivre. S’il y avait plus d’un trouble fête, Shinji n’avait plus envie que ça de se faire casser la gueule en règle. Et mieux valait régler le problème au plus vite, histoire que les autres clients ne soient pas gênés.
Arrivé auprès de sa barmaid, Shinji se contenta d’attrapper une bouteille de bière qu’il explosa sur la main du gêneur.
- Dehors.
Clair, concis et précis. Comme toujours.
Le clubbeur se contenta pourtant de le fixer d’un regard bovin.
- Dehors, j’ai dit. Et si tu essaies encore de peloter ma barmaid, je te casse la gueule, compris ?
Son doigt alla pointer la porte alors que le Shukon attrappait le japonais par le col de sa chemise, grimaçant lorsque celui-ci ouvrit la bouche… Ce mec était imbibé d’alcool, c’en était écœurant. Et puisqu’il ne semblait pas comprendre, un videur fut appelé à la rescousse pour lui expliquer où se trouvait la porte.
- Ca va Keiko ?
La barmaid lui fit signe que oui, ajoutant au passage qu’elle n’avait presque plus de saké. Ok ok, il avait compris : c’était à Bibi de s’y coller ce soir. A ce rythme, il allait finir par réellement tuer Himura.
Tout à ses réflexions, il se frayait un chemin à coups d’épaules et de coudes dans la masse compacte de danseurs.
- Hey ! Tu pourrais au moins t’excuser, je suis pas une naine tu m’as vu ? Alors on demande minimum pardon quand on arrache une épaule aux gens !
Quoi encore ?
C'était d'ailleurs ce que semblait dire le regard d'encre qu'il posa sur la fille qui venait de le saisir au col. Ses mains vinrent libérer sa chemise alors qu'il continuait son chemin.
- Mouais. Pardon.
Un Pardon jeté par dessus l'épaule à la Ouais-c'est-bon-?-t'as-fini-de-me-faire-chier-?.